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Le ministre Fils Metellus mobilise les maires du Nord dans le cadre du plan de développement 2025-2030 coordonné par les institutions internationales
CAP-HAÏTIEN, Haïti — Le ministère de l'Économie et des Finances a organisé vendredi la deuxième journée de consultations régionales du Grand Nord dans le cadre du Plan de relance et de développement d'Haïti 2025-2030, une initiative coordonnée par la Banque interaméricaine de développement (BID) qui vise à créer des pôles économiques alternatifs à Port-au-Prince.
Cette initiative, formalisée en avril 2025 lors des réunions de printemps du FMI et de la Banque mondiale à Washington, représente une approche de décentralisation économique dans un contexte où la capitale haïtienne demeure largement paralysée par l'insécurité. Le ministre Alfred Fils Metellus a encouragé les maires présents, les qualifiant de "champions qui permettent à de nouveaux d'émerger".
Les consultations ont réuni les représentants des trois départements du Grand Nord : Rébécaline Ziky Decelmond, mairesse d'Acul du Nord et présidente de l'Association des maires du Nord (AMNORD) ; Josie Alusma, magistrat de Port-de-Paix et président de l'Association des maires du Nord-Ouest ; et Amid Gabriel, magistrat de Carice et président de l'Association des maires du Nord-Est.
Cette mobilisation des élus locaux s'inscrit dans la stratégie de "départementalisation" soutenue par les partenaires techniques et financiers internationaux. Albaret Géraud, chargé des opérations de la BID, Johan Wiesman, chargé d'affaires a.i. de l'Union européenne en Haïti, et Ariel Pinot, coordonnateur résident a.i. de l'ONU, ont manifesté leur appui à cette approche.
Le plan, coordonné par la BID en collaboration avec la Banque mondiale, les Nations unies et l'Union européenne, s'articule autour de trois piliers : renforcer le développement économique et le secteur privé ; améliorer l'accès aux services de base et le développement du capital humain ; et renforcer la capacité institutionnelle, l'État de droit, la justice et la sécurité.
Cette approche de décentralisation économique répond à une nécessité pratique. Avec environ 90% de Port-au-Prince sous contrôle des gangs selon l'ONU, l'identification de "pôles économiques alternatifs" devient cruciale pour maintenir une activité économique nationale. Le Grand Nord, relativement moins affecté par l'insécurité, présente des conditions plus favorables pour attirer les investissements.
Cependant, plusieurs défis se posent. La capacité institutionnelle locale reste limitée dans de nombreuses communes du Nord, et les infrastructures de base nécessitent des investissements considérables. Les maires présents ont d'ailleurs "réclamé du ministre de l'Économie et des Finances la mise en œuvre concrète des actions qui seront incluses dans le budget à partir de ce plan".
Cette demande soulève la question cruciale du financement. Dans un contexte où l'État haïtien peine à mobiliser des ressources pour ses fonctions essentielles, la capacité à allouer des budgets significatifs au développement régional reste incertaine. Le succès de cette initiative dépendra largement de l'engagement financier des partenaires internationaux.
L'évaluation rapide des impacts de la crise dirigée par la Banque mondiale, qui sert de base à ce plan, a identifié les besoins urgents prioritaires. Toutefois, la transition d'une logique d'urgence humanitaire vers une stratégie de développement à moyen terme nécessite une stabilisation sécuritaire qui n'est pas encore acquise.
Le format hybride des consultations (présentiel et en ligne) témoigne d'une adaptation aux contraintes actuelles, mais révèle aussi les défis de connectivité et d'infrastructure qui devront être surmontés pour que ces régions deviennent effectivement des alternatives économiques viables.
Cette initiative de la BID représente l'une des rares stratégies de développement à moyen terme actuellement en cours en Haïti. Son succès pourrait déterminer la viabilité d'une approche de décentralisation économique comme réponse à la crise de gouvernance de Port-au-Prince, mais sa réussite dépendra de la coordination effective entre les multiples acteurs impliqués et de la mobilisation de financements substantiels.