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Cher René,
Une autoroute porte désormais ton nom dans mon imaginaire : l'Autoroute René Depestre. Elle court de Carrefour-Desruisseaux à Jacmel, de la mémoire au présent, de la poésie à la vie. Chaque panneau qui l'indique n'est pas seulement un repère urbain, mais une halte d'espérance, un rappel de ce que signifie écrire, aimer, combattre, rêver.
Devant tes cent ans, je viens m'incliner. Mille fois « bonne fête » dans la ferveur d'une existence consacrée aux mots, aux idées, au partage. L'amie Camille a souhaité que, pour chacune de nos rencontres autour de ton centenaire, nous t'écrivions une lettre. Voilà la première, écrite dans la lumière de ton jour anticipé, ce 29 août, où ton souffle centenaire a pris la mesure d'un siècle.
Je voudrais te dire que nous avons lancé ta fête en musique et en poésie. Le 22 août 2025, au 2742 Funston St, Hollywood, FL 33020, une soirée a ouvert la marche, en prélude à ta célébration. À l'arrière de la scène, une affiche proclamait ton nom, tandis que Wooly et Fabrice offraient aux cœurs attentifs les plus belles pages de la poésie haïtienne. Fabrice, d'un sourire complice, m'a confié qu'il était fasciné par cette affiche. Et Kettly, dans un élan d'admiration, m'a soufflé que tu es un beau monsieur, ce qui, à cent ans, ne signifie pas seulement la grâce des traits, mais la noblesse d'un être.
Tout au long de la soirée, je n'ai cessé de voyager. Chaque note, chaque mot, me renvoyait à toi. Je marchais, en pensée, sur cette route nouvelle que nous rêvons pour Jacmel, une route de l'amitié, une route de la fraternité. Dans ce projet, la ville, en se reconstruisant, épousera ton nom : autoroute René Depestre, comme pour dire que désormais ta poésie n'est plus seulement un livre ou un chant, mais un sillage vivant où circulent les hommes, les idées, les enfants de demain.
Cher poète, ton centenaire n'est pas une halte : c'est un carrefour. Tu nous montres qu'à travers la littérature, à travers la construction d'une route, d'un rêve, d'un pays, l'essentiel demeure de bâtir des ponts. Et aujourd'hui, à ton nom, nous levons nos voix comme on lève un drapeau : celui de l'amitié, de la poésie, de la dignité humaine.
Bon centenaire, René ! Que tes cent ans s'ouvrent comme une mer de clarté, que ton rire continue d'accompagner nos pas, et que la route que tu as tracée pour nous reste à jamais illuminée.
Avec tendresse et gratitude,
Yves Lafortune
Miami, le 22 août 2025
