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L'assistance d'urgence du PAM en Haïti : l'argent liquide plus efficace que les vivres

Étude PAM révèle que transferts monétaires surpassent distributions vivres pour réduire insécurité alimentaire en Haïti selon données 7763 ménages.

Table des matières

Port-au-Prince, 22 mai 2025 – Une étude majeure du Programme alimentaire mondial (PAM) en Haïti révèle que les transferts monétaires se révèlent plus efficaces que les distributions de vivres pour lutter contre l'insécurité alimentaire dans le pays. Cette analyse, basée sur les données de 7 763 ménages dans 47 communes de huit départements, remet en question certaines pratiques traditionnelles de l'aide humanitaire.

L'argent liquide, un remède plus puissant

Les résultats sont sans appel : les transferts en espèces de 120 dollars sur trois cycles ont permis de réduire de 40 points de pourcentage le nombre de bénéficiaires souffrant de privation alimentaire sévère, contre seulement 19 points pour les distributions de vivres en demi-ration. Cette différence spectaculaire s'explique par la flexibilité qu'offre l'argent liquide aux familles haïtiennes.

L'argent liquide offre une flexibilité que ne permettent pas les distributions de vivres, permettant aux ménages de répondre à leurs besoins spécifiques selon leurs priorités. Cette approche globale permet aux bénéficiaires de sortir plus efficacement du cercle vicieux de la pauvreté.

Le paradoxe des vivres en demi-ration

L'étude révèle un fait troublant : contrairement aux attentes, les bénéficiaires de vivres en demi-ration ont tendance à adopter davantage de stratégies d'adaptation négatives. Le pourcentage de ménages contraints de réduire leurs repas ou de priver les adultes au profit des enfants a augmenté de 12 points. Cette situation s'explique par l'insuffisance des demi-rations pour couvrir les besoins énergétiques mensuels des familles.

Trois cycles valent mieux que quatre

Une autre découverte majeure concerne l'optimisation du nombre de cycles de distribution. Trois cycles de 120 dollars se révèlent plus efficaces que quatre cycles de 100 dollars, réduisant respectivement de 40 et 19 points de pourcentage la proportion de ménages en situation alimentaire critique. Cette observation remet en question la logique qui consiste à multiplier les distributions de montants plus faibles.

L'importance du timing

Le facteur temps joue un rôle crucial dans l'efficacité de l'assistance. Les projets d'une durée de 3 à 4 mois montrent les meilleurs résultats, avec une réduction de 38 points de pourcentage des ménages en situation alimentaire précaire. Au-delà de six mois, l'impact diminue considérablement, suggérant que la rapidité d'intervention est essentielle en situation d'urgence.

Cette temporalité optimale s'explique par la capacité des bénéficiaires à investir rapidement l'argent reçu dans des activités génératrices de revenus ou dans la reconstitution de leur capital, créant un effet multiplicateur bénéfique.

Le défi des doubles rations

Face aux contraintes logistiques, certains projets optent pour des "doubles rations" distribuées en une fois. Bien que pratique, cette approche s'avère moins efficace, réduisant l'impact sur la consommation alimentaire de 18 points de pourcentage contre 35 points pour les distributions étalées normalement.

Vers une nouvelle approche de l'aide

Dans un contexte de raréfaction des financements humanitaires, le PAM propose trois options stratégiques : privilégier les transferts monétaires avec moins de cycles mais des montants plus élevés, maintenir les vivres avec plus de cycles en rations réduites, ou adopter une approche mixte combinant cash initial et vivres en fin de programme.

Un outil de mesure affiné

L'étude introduit également une nouvelle méthodologie pour calculer la valeur optimale des transferts. Basée sur un "panier de dépenses minimum" de 147 dollars pour une famille de cinq personnes, cette approche hybride combine les besoins alimentaires essentiels (2 100 calories par jour et par personne) et la capacité économique réelle des ménages vulnérables.

Cette recherche arrive à point nommé alors qu'Haïti traverse une crise humanitaire sans précédent, avec des millions de personnes en situation d'insécurité alimentaire aiguë. Les conclusions du PAM pourraient révolutionner les pratiques d'aide d'urgence, non seulement en Haïti mais aussi dans d'autres contextes de crise similaires.

L'enjeu désormais est de convaincre les bailleurs de fonds et les partenaires de mise en œuvre d'adopter ces nouvelles approches, malgré les réticences traditionnelles face aux transferts monétaires dans des contextes d'instabilité politique et sécuritaire.

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