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Analyse de la stratégie chinoise pour remodeler la gouvernance mondiale à travers institutions parallèles et partenariats stratégiques
PÉKIN, Chine — Une analyse des initiatives diplomatiques et institutionnelles récentes révèle que le président chinois Xi Jinping poursuit activement une vision d'un ordre mondial post-américain, exploitant l'influence institutionnelle mondiale, la diplomatie et les partenariats stratégiques pour remodeler les normes et systèmes de gouvernance en faveur de la Chine.
Xi Jinping articule régulièrement que le monde traverse "de grands changements jamais vus depuis un siècle", percevant les mutations géopolitiques, la fragmentation occidentale et le déclin relatif américain comme une fenêtre d'opportunité pour que la Chine assume un rôle dirigeant. Son ambition ne vise pas à autonomiser les nations plus petites, mais à construire un monde multipolaire avec des puissances régionales fortes, chacune dominante dans sa propre sphère, et la Chine au centre en Asie.
Cette vision s'enveloppe régulièrement dans la rhétorique du multilatéralisme et de la "gouvernance centrée sur l'ONU", remettant subtilement en question "l'ordre international fondé sur les règles" dirigé par les États-Unis. Le récent sommet de l'Organisation de coopération de Shanghai à Tianjin illustre cette stratégie, où Xi a promu un "nouvel ordre mondial" aux côtés de Vladimir Poutine et Narendra Modi.
La Chine construit des institutions mondiales parallèles - comme la nouvelle Banque de développement de l'OCS, la promotion d'une monnaie BRICS, l'augmentation des voyages sans visa et l'approfondissement des liens économiques avec le Sud global, l'OPEP+, l'ASEAN et les États du Golfe - en dehors des vetos occidentaux, comme alternatives aux plateformes économiques et technologiques dominées par l'Occident.
Diplomatiquement, la Chine promeut le "multilatéralisme authentique" et dénonce "l'hégémonisme et la politique de puissance", dénigrant les valeurs libérales occidentales comme biaisées contre les systèmes est-asiatiques. Xi cherche à faire progresser les normes autocratiques par rapport aux démocratiques, particulièrement dans des domaines comme la gouvernance d'internet et les droits humains.
Militairement, la Chine vise à construire une force de classe mondiale capable de défendre ses intérêts globalement, comme en témoignent les investissements dans les technologies avancées et les bases mondiales. Économiquement, Pékin tente d'affaiblir la dominance américaine à travers l'Initiative Belt and Road, les banques de développement, et les campagnes d'autosuffisance et d'avancement technologique.
Cependant, cette stratégie présente des fragilités significatives. Les puissances concurrentes et le scepticisme de certains voisins signifient qu'un ordre entièrement dirigé par la Chine reste aspirationnel. La vision chinoise trouve des alliés, mais l'unité reste fragile et des écarts de valeurs globaux majeurs persistent.
Les observateurs notent que bien que Xi ait gagné du terrain, la Chine n'est pas prête à remplacer unilatéralement les États-Unis comme fournisseur de biens publics mondiaux et de leadership universel. Au lieu de cela, elle bénéficie davantage d'un ordre mondial affaibli et fragmenté.
La stratégie de Xi s'articule autour de plusieurs piliers : la construction institutionnelle avec la Banque de l'OCS et la monnaie BRICS ; le messaging diplomatique promouvant le "multilatéralisme authentique" ; le remodelage narratif recadrant la Seconde Guerre mondiale et remettant en question la légitimité occidentale ; l'expansion militaire avec des bases mondiales et technologies avancées ; et les initiatives économiques incluant Belt and Road et l'autosuffisance technologique.
Cette approche multidimensionnelle révèle une stratégie patiente mais déterminée pour éroder progressivement l'hégémonie américaine sans confrontation directe, tout en construisant des alternatives attrayantes pour les pays du Sud global frustrés par la dominance occidentale.
L'efficacité de cette stratégie dépendra largement de la capacité de la Chine à maintenir la cohésion parmi ses partenaires tout en gérant ses propres défis économiques internes et les résistances géopolitiques croissantes, particulièrement avec le retour d'une administration Trump potentiellement plus confrontationnelle.