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L'opération menée à Kenscoff vise à sécuriser une infrastructure stratégique prise en otage par le gang "Viv Ansanm"
PORT-AU-PRINCE, Haïti — La Police nationale d'Haïti (PNH) a annoncé lundi avoir repris le contrôle du site de télécommunications TÉLÉCO à Kenscoff, une infrastructure d'importance capitale qui était illégalement occupée par le groupe armé "Viv Ansanm".
Cette opération d'envergure, menée sous le leadership du directeur général André Jonas Vladimir Paraison en collaboration avec la Mission multinationale de soutien à la sécurité (MSS), marque une rare victoire stratégique dans un contexte où les gangs contrôlent désormais approximativement 90% de Port-au-Prince, selon les dernières estimations onusiennes.
"Les forces de l'ordre, conjointement avec les contingents de la MSS, occupent actuellement le site, qui est désormais sécurisé et placé sous protection permanente", précise le communiqué de presse publié le 25 août.
Le site TÉLÉCO de Kenscoff revêt une importance cruciale pour les communications nationales, sa prise en otage par le gang ayant probablement affecté les services de télécommunications dans plusieurs régions du pays. La reconquête de cette infrastructure témoigne de la détermination des autorités à protéger les services essentiels à la population dans un contexte sécuritaire dramatiquement dégradé.
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L'opération s'inscrit dans une stratégie plus large de démantèlement des foyers de violence et de restauration de l'ordre public, alors que la crise haïtienne a atteint des proportions catastrophiques. Selon les dernières données humanitaires, plus de 1,3 million de personnes ont été contraintes de fuir leurs foyers, soit une augmentation significative par rapport aux estimations précédentes.
La PNH a souligné que "les opérations conjointes se poursuivront sans relâche jusqu'à la stabilisation durable de la zone", bien que les défis demeurent considérables face à l'expansion territoriale des gangs armés.
Le groupe armé "Viv Ansanm" (Vivre Ensemble), qui contrôlait le site, fait partie de la coalition de gangs qui a contribué à l'effondrement quasi-total du contrôle étatique sur la capitale haïtienne. Cette alliance criminelle a orchestré une prise de contrôle méthodique des infrastructures et quartiers de Port-au-Prince, réduisant l'espace sous contrôle gouvernemental à une portion congrue.
La collaboration entre la PNH et la MSS, dirigée par le Kenya et déployée depuis juin 2024, peine à inverser la tendance face à l'ampleur de la tâche. Cette mission internationale, autorisée par l'ONU, vise à appuyer les forces haïtiennes dans leur lutte contre des gangs armés qui disposent désormais d'un contrôle territorial quasi-hégémonique sur la capitale.

La sécurisation du site TÉLÉCO représente également un enjeu économique majeur, les télécommunications étant vitales pour le fonctionnement des institutions, des entreprises et des services d'urgence dans un pays où l'État central ne contrôle plus qu'une fraction minime de son propre territoire.
Dans son communiqué, la PNH a remercié la population "pour sa vigilance et son soutien constant aux forces de l'ordre dans ce combat pour la paix et la sécurité", accompagnant ce message d'un slogan en créole : "Mwen p ap domi, polisyè, polisye pa dwe domi pou pèp la ka domi" (Je ne dormirai pas, policier, les policiers ne doivent pas dormir pour que le peuple puisse dormir).
Cette opération ponctuelle intervient paradoxalement alors que la situation sécuritaire globale continue de se détériorer. L'explosion du nombre de déplacés internes, passé à 1,3 million de personnes, témoigne de l'accélération de la crise et de l'incapacité des forces gouvernementales à enrayer l'expansion des groupes criminels.
Cependant, les défis demeurent considérables. Avec 90% de Port-au-Prince sous contrôle des gangs selon l'ONU, les forces de l'ordre opèrent désormais dans un environnement où elles sont largement minoritaires territorialement, disposant souvent d'un armement inférieur à celui de leurs adversaires.
Le succès ponctuel de l'opération de Kenscoff ne peut masquer l'ampleur de la tâche de reconquête qui attend les autorités haïtiennes et leurs partenaires internationaux dans un pays où l'effondrement de l'État semble désormais quasi-total dans la capitale.
Pour les Haïtiens, cette rare victoire tactique représente un maigre espoir dans un contexte où l'insécurité a atteint des niveaux historiques et où la majorité de la population vit désormais sous le joug de groupes armés qui ont substitué leur autorité à celle de l'État.